Fouiller dans le téléphone de son/sa partenaire est presque devenu normal. On fouille pour s’assurer que le danger est loin. Pour se rassurer. Et pourtant, au-delà du fait que ça soit une pratique très intrusive, celle-ci est illégale.
Lien entre espionnage et violences conjugales
Fouiller dans le téléphone de son partenaire ? C’est monnaie courante pour 4 Français sur 10 selon une étude réalisée par Flashs/IFOP pour le Journal du Geek, publiée le jeudi 11 mai. L’étude voulait en savoir davantage sur les habitudes numériques concernant les couples, dont la part d’intimité qu’on laisse volontiers (ou pas) à son partenaire. Épier ses réseaux sociaux, lire ses messages, vérifier ses nouveaux abonnements sur les réseaux sociaux, ce qu’il/elle like ou encore regarder qui il/elle a appelé dernièrement. Une habitude qui peut paraître toxique et malsaine mais qui concerne pourtant de nombreux couples. Chez les moins de 35 ans, 67% des femmes et 56% des hommes ont déjà fouillé le téléphone de leur partenaire et 57% des moins de 25 ans ont été victimes d’une violation de leur intimité numérique par leur partenaire. Et il semblerait que lorsque l’on cherche, on trouve, puisque 50% de celles et ceux qui se sont déjà risqué à fouiller le téléphone de leur conjoint.e y ont découvert quelque chose.
Si fouiller dans le téléphone de son partenaire n’est pas un geste anodin, il pourrait également avoir un lien important avec les violences conjugales. Ce qui ramène cette pratique à un niveau de danger important. En effet, plus de la moitié (52%) des personnes ayant subi à plusieurs reprises des violences physiques de leur partenaire déclarent qu’il/elle a déjà regardé dans leur téléphone portable à leur insu. Plus loin encore que le simple fait de fouiller dans le téléphone de son partenaire, certains vont jusqu’à confisquer le smartphone. Une situation qui est arrivée à 35% des personnes victimes de violences physiques contre 4% auxquelles cela n’est jamais arrivé. Dans la même lignée, 47% des personnes qui ont connu l’isolement de la part de leur partenaire observent la crainte d’être espionnées. « Comme le montre cette étude, les entorses à l’intimité numérique peuvent aussi être symptomatiques d’une violence ou d’une emprise au sein des couples », explique Louise Jussian, chargée d’études senior au pôle Politique/Actualités de l’IFOP. « On voit bien que le smartphone de l’autre est non seulement un objet de curiosité et de suspicion, mais aussi un moyen de chantage et d’isolement ».
Une pratique illégale
En plus d’être sur le fil rouge de la morale, cette pratique est en fait totalement illégale. Un détail qui a pourtant son importance. En effet, fouiller dans le téléphone de son partenaire s’apparente à une violation de la vie privée, « condamné par les articles 226 et suivants du Code pénal sur les atteintes à la vie privée, ainsi que le 226-15, qui protège le secret des correspondances », comme l’explique le Huffington Post, qui s’est entretenu avec une avocate à ce sujet. Concrètement, si le couple est lié par un pacte civil de solidarité, la personne qui a violé l’intimité numérique de son partenaire peut encourir jusqu’à deux ans de prison et 60 000 euros d’amende. « C’est une pratique illégale. Certes, elle est extrêmement rarement poursuivie isolément, mais elle est souvent prise en compte dans un ensemble d’autres infractions, notamment dans les cas de violences conjugales. Fouiller le portable de son ou sa partenaire apparaît d’ailleurs sur le Violentomètre », précise Maître Laguens, avocate au barreau de Paris.