Ce lundi 12 février, la justice administrative a confirmé la décision du préfet du Nord, à savoir rompre le contrat qui lie le lycée musulman Averroès de Lille à l’Etat en raison d’enseignement jugés «contraires aux valeurs de la République». Cette décision intervient après que le préfet du Nord a déjà suspendu les subventions publiques à compter de la rentrée 2024. 

Manquement à ses obligations

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Le tribunal, renvoyant le dossier au fond, a donc rejeté la demande du lycée, qui avait demandé la suspension en urgence de cette décision.  «Il n’y a pas lieu de maintenir le contrat d’association liant le lycée Averroès à l’Etat jusqu’à ce que la décision de résiliation de ce contrat, prise par le préfet du Nord, soit examinée par les juges du fond», a expliqué le tribunal dans un communiqué. Le tribunal administratif a ainsi justifié son choix en s’appuyant sur certains arguments du préfet du Nord. Selon lui, l’établissement a manqué à ses obligations à deux reprises. D’une part, « en s’opposant, sans motif suffisant, à un contrôle inopiné du CDI prévu le 27 juin 2022 », et d’autre part en citant, comme source pour les cours d’éthique musulmane, un livre prônant la peine de mort en cas d’apostasie.

C’est « un détournement de pouvoir manifeste », « une mesure de police administrative qui vise davantage l’identité de l’établissement et ce qu’il porte » que de potentiels « manquements administratifs », avait alors déclaré Vincent Brengarth, avocat du lycée Averroès. Il a notamment pointé du doigt un « deux poids deux mesures », alors que le lycée privée catholique Stanislas est en pleine débâcle, notamment parce qu’il est accusé de certaines dérives. «Je ne répondrai pas sur ce dernier point, qui est d’ailleurs contredit par l’actualité», avait rétorqué l’avocat de la préfecture, François Pinatel. « Il s’agit d’une décision inacceptable qui balaie sans y répondre nos arguments pour adopter ceux de la préfecture », s’est de son côté insurgé Paul Jablonski, l’avocat de l’établissement.

Financements douteux

Mais qu’est-il reproché exactement au lycée musulman Averroès ? Pour commencer, les sources de financement n’ont jamais été claires. L’établissement a longtemps nié recevoir des revenus de l’étranger pour finalement admettre un don de 940 000 euros provenant de la Qatar Charity. Selon les journalistes Christian Chesnot et Georges Malbrunot, ce financement intervenait « dans le cadre d’un programme prosélyte », baptisé Al Ghaith, « visant à enraciner un islam politique au sein des communautés musulmanes d’Europe ». Mais ce n’est pas tout. Les ouvrages disponibles au CDI seraient « vieillissants » et feraient l’impasse sur de nombreux thèmes de société, dont « les relations entre les sexes et l’homosexualité », explique le préfet. Dans le même sens, tous les livres religieux seraient consacrés à l’islam, « ce qui est profondément déséquilibré et donc incompatible avec l’obligation de dispenser l’enseignement dans le respect de toutes les croyances ». Enfin, le préfet a épinglé la présence d’un livre de l’imam Hassan Iquioussen, expulsé depuis pour des liens supposés avec l’islamisme radical.

« Si la doctrine propre de l’enseignement privé permet à celui-ci de se référer dans son projet éducatif à des valeurs religieuses ou philosophiques spécifiques, il reste que l’établissement sous contrat est soumis, dans la dispense de l’enseignement, à la même neutralité que les établissements publics. Tout endoctrinement, ou toute pression d’ordre philosophique ou religieux sont exclus. » Le cours d’éthique musulmane serait celui qui pose le plus problème. Si à priori, il relève du caractère propre d’un établissement scolaire religieux, la teneur du message adressé, lui, ne serait pas conforme aux valeurs de la République. Les enseignements seraient notamment fondés sur l’ouvrage Quarante hadiths, de l’imam An-Nawawi, « s’agissant de l’égalité entre les sexes, cet ouvrage énonce par exemple l’interdiction pour une femme malade de se faire ausculter par un homme lorsqu’une femme peut réaliser cet acte. (…) L’apostasie y est prohibée sous peine de mort (…). Les lois divines y sont présentées comme prééminentes. »

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