Un billet qui fait froid dans le dos. Le mercredi 3 juillet dernier, le site d’extrême droite, Réseau libre, hébergé en Russie, publiait un article menaçant une centaine d’avocats et figures politiques « à éliminer ». En cause ? Ils ont tous signé une tribune publiée dans Marianne, contre le Rassemblement national.
« Neutraliser » la majorité des avocats
« À envoyer dans un fossé ou dans un stade, ces avocats déclarent déjà ne pas respecter le verdict des urnes en cas de victoire du RN », menace ainsi Réseau libre. Ces avocats signataires, qualifiés de « pourritures », ne seraient pas les seules cibles. « Bien entendu, ce ne sont pas les seuls, c’est la grande majorité des avocats qu’il est nécessaire de neutraliser », écrit l’auteur du billet. « Ces vermines en robe noire » (les avocats, NDLR) sont attaquées pour avoir porté plainte en 2001 contre SOS racaille, un autre site d’extrême droite.
Une menace prise au sérieux par les avocats dont les informations personnelles ont été divulguées. « Quand on publie une liste de noms et de coordonnées permettant d’atteindre des personnes, on est conscient que, potentiellement, certaines personnes passeront à l’acte », estime Yasmine Buono, fondatrice de l’organisme Net Respect et spécialiste du cyberharcèlement, dans les colonnes de 20 Minutes. Et les instigateurs de cette menace se pensent tout permis : « Nous ne sommes pas formellement identifiés, nous ne serons pas arrêtés, et nous serons peut-être condamnés, on s’en tape ! », est-il écrit.
Le parquet de Paris a été saisi
Jeudi soir, une plainte a été déposée par 68 avocats auprès du parquet de Paris pour « menaces de mort envers un avocat », « cyberharcèlement » et « provocation à la commission d’une infraction pénale ». Le garde des Sceaux « condamne avec la plus grande fermeté » la publication de cette liste. « Ceux qui veulent la mort de nos libertés commencent toujours par s’en prendre aux avocats », a ainsi déclaré Eric Dupond-Moretti. Le bâtonnier de Paris, lui, a estimé que « la démocratie est plus que jamais menacée lorsque circulent des listes d’avocats à éliminer parce qu’ils remplissent leur mission ». L’association des avocats pénalistes « assure aux confrères concernés son inconditionnel soutien ».
« Les Français sont devenus un peuple de larves »
Au lendemain des résultats du second tour des législatives, le lundi 8 juillet 2024, le site a réitéré ses menaces. « Comme je le dis depuis des années, les Français sont devenus un peuple de larves et il y a donc 2 options : Soit on prend acte et on décide de laisser faire en se contentant de se protéger avec les siens, soit on décide de mettre au pas ce troupeau de connards avec les seules méthodes restantes et que je vous laisse imaginer », écrit l’auteur, qui signe sous le nom de « Léon ». Dans son billet, il propose aux lecteurs d’attaquer « régulièrement non pas des cibles au hasard parmi les 95 % de connards, mais des cibles qui assument leur statut d’ennemi ». Qui sont ces « cibles » ?
« Des avocats, journalistes, associatifs et politicards de second ordre » et précise même que pour les « neutraliser », il n’y a « pas besoin obligatoirement d’armes à feu », mais qu’un « bon couteau de cuisine, voire une arbalète, voire un manche de pioche » peuvent suffire. Malgré ces propos violents, qui font l’apologie du crime, l’auteur se défend d’être « un terroriste ». Il désigne très clairement les cibles dont il parle et fait référence à Manuel Bompard (LFI), Alexis Corbière (ex-LFI), Rachel Keke, Yassine Bouzrou, l’avocat engagé contre les violences policières et Ian Brossat.
« Après avoir menacé des avocats, l’extrême-droite appelle à tuer des élus de gauche. J’ai l’honneur d’être sur cette liste. Évidemment, je porte plainte », a réagi, sur X, le sénateur PCF. Yassine Bouzrou a également déposé plainte lundi auprès du Parquet national antiterroriste (Pnat), a-t-il fait savoir à Radio France.