Un récit glaçant. Qui donne la nausée. Dominique Pélicot a répondu à la question que l’ensemble de l’opinion publique se posait : comment a-t-il fait pour la droguer aussi longtemps, sans qu’elle ne se doute jamais de rien ? Si certains faisaient part de leur doute quant à la véracité de l’ensemble des propos de la victime, Gisèle Pélicot, le suspense est aujourd’hui levé. Le septuagénaire s’est appliqué à détailler pendant plusieurs heures comment, entre 2011 et 2020, il a méthodiquement drogué et fait violer son ex-épouse Gisèle Pelicot par des dizaines d’hommes.
« Dans la majorité des cas, c'était relativement facile »
Durant près de dix ans, Dominique Pelicot a mené un rituel sordide dans le huis clos de leur maison de Mazan (Vaucluse). Grâce à des comprimés de Temesta, un puissant anxiolytique, il droguait régulièrement son ex-femme avant de permettre à des hommes qu’il rencontrait sur internet de la violer, sans qu’elle ne s’en rende compte. C’est un infirmier, trouvé en ligne, qui l’aurait aidé à connaître les doses requises pour arriver à ses fins. « Je suis tombé en 2010 sur ce qui était pour moi autre chose qu’un infirmier : au minimum, un médecin », révèle-t-il. Dominique Pelicot a expliqué à la cour qu’il avait « mis du temps à se décider », avant de progressivement augmenter les doses pour garantir que Gisèle Pelicot ne se réveille pas pendant les agressions.
Interrogé sur son mode opératoire, il a décrit avec froideur comment il préparait les doses à l’avance et les administrait discrètement dans les repas de son épouse. « Je faisais la cuisine. La plupart du temps, elle était dans la chambre, elle avait déjà mangé et reçu le produit », a-t-il détaillé sans une once d’émotion. « Je faisais la cuisine. Elle a eu des doutes par moments. Mais dans la majorité des cas, c’était relativement facile ». Les vidéos et photos des sévices, découvertes par la police, témoignent de la gravité des abus infligés à la victime. « Sur certaines scènes de 2014, 2015, 2016, jusqu’en 2018, je crois, il y a des moments où mon épouse réagit », précise-t-il. En d’autres termes, la quantité d’anxiolytiques n’était pas suffisante. C’est là qu’il a commencé à augmenter les doses.
Une absence totale de remords
Le procès a révélé non seulement les détails choquants des violences sexuelles perpétrées, mais aussi l’absence totale de remords chez Dominique Pelicot. Alors qu’il était interrogé par le président de la cour, Roger Arata, il a décrit les actes avec une précision clinique, affirmant qu’il « déshabillait sa femme selon les désirs de chacun ». Alors que Dominique Pelicot se trouve à la barre, le président de la cour l’interroge sur ses émotions lors de la préparation des agressions. « Est-ce que vous commenciez déjà à vivre ces moments comme quelque chose d’excitant ? », demande le magistrat. D’une voix calme, l’accusé répond : « C’est un mélange des deux : du plaisir et du mal-être ». Le juge, surpris par cette affirmation, poursuit : « Du mal-être ? ». L’accusé, visiblement troublé, marque une pause, sa voix se brisant légèrement : « Oui, parce que c’est quelqu’un que… », il s’interrompt, cherchant ses mots avant de continuer, la gorge serrée : « Que j’aime énormément, même si ça vous paraît paradoxal. » Gisèle Pelicot, laisse couler des larmes après cette déclaration.
Les images des viols, diffusées durant l’audience, ont figé la salle dans un silence pesant. « C’est une chose, une chose qu’on maltraite », a souligné Stéphane Babonneau, l’avocat de la partie civile, après avoir vu les vidéos. « Je reconnais la violence dans ces viols », a concédé Pelicot, tout en ajoutant qu’il n’y avait pas de « haine ». Cette distorsion des faits met en lumière l’étendue de son emprise psychologique sur la victime.