Face aux révélations d’agressions sexuelles visant l’abbé Pierre, la Fondation qui porte son nom amorce un tournant difficile mais nécessaire. Décidée à poursuivre ses missions d’aide aux plus démunis tout en prenant ses distances avec les actes reprochés à son fondateur, elle entame une nouvelle ère.
Pourquoi un changement de nom ?
En juillet 2024, une première enquête commandée par Emmaüs et la Fondation Abbé Pierre révèle des accusations de violences sexuelles contre Henri Grouès, plus connu sous le nom de l’abbé Pierre, icône de la lutte contre la précarité et fondateur d’Emmaüs. Ces accusations, détaillant des attouchements et des abus présumés commis entre les années 1950 et 2000, impliquent notamment des victimes mineures au moment des faits. En septembre, 24 témoignages viennent exprimer ces révélations, poussant la Fondation à reconsidérer son attachement symbolique à son fondateur.
« Malgré notre rôle et notre engagement, il était impératif de prendre cette décision très difficile », explique Christophe Robert, délégué général de la Fondation. « Nous devons à la fois rendre hommage à notre mission de justice sociale et respecter la douleur des victimes en nous détachant de l’image de l’abbé Pierre. » Le nom du prêtre est donc en voie de retrait officiel du logo et de la communication de l’association.
Une décision pour préserver la mission
Changer de nom, c’est aussi pour la Fondation préserver la confiance du public et de ses partenaires. Consciente des conséquences sur son image, l’organisation souhaite mettre en avant son travail essentiel : la lutte contre le mal-logement et l’injustice sociale. Christophe Robert affirme que, malgré cette fonte d’identité, l’action de la Fondation ne faiblira pas : « La Fondation change de nom, pas de combat. Nous continuons à nous mobilisons avec la même détermination pour aider les personnes en situation de précarité « .
Afin de marquer cette transformation, la Fondation lancera dès ce 6 novembre une nouvelle campagne intitulée « Jamais nous ne baisserons les bras ! » , affirmant son attachement indéfectible à sa cause. En parallèle, le lieu de mémoire d’Esteville, en Seine-Maritime, qui était dédié à l’abbé Pierre, sera définitivement fermé.
Une procédure juridique complexe
La Fondation a déjà retiré la mention « fondateur abbé Pierre » du logo d’Emmaüs France, et des juridiques ont été initiées pour officialiser le nouveau nom. Cependant, la procédure s’annonce complexe. En raison des implications légales et des démarches administratives, l’association espère finaliser le processus dans les mois à venir. « Il s’agit d’un choix de solidarité envers les victimes et de respect pour les valeurs que nous défendons », a précisé la Fondation, qui souhaite ainsi tourner la page tout en restant fidèle à ses engagements.
Ce changement marque une étape importante pour l’organisation qui, bien qu’en pleine transition, réaffirme son engagement et sa volonté d’agir avec transparence et intégrité envers les plus précaires, en gardant vivante la flamme de la lutte contre les inégalités.