Le ton est donné : le RN, fort de ses 123 députés, brandit la menace de voter la motion de censure déposée par la gauche lorsque le gouvernement actionnera le 49.3 pour faire adopter le budget. Cette manœuvre pourrait renverser le gouvernement Barnier, une possibilité que Marine Le Pen et ses lieutenants envisagent ouvertement, tout en rejetant la responsabilité de cette crise politique sur le président Emmanuel Macron. « Nous n’acceptons pas que le pouvoir d’achat des Français soit amputé, c’est une ligne rouge », a déclaré Marine Le Pen, bien décidée à pousser l’exécutif dans ses retranchements.
Un bras de fer stratégique
Depuis son arrivée à Matignon, Michel Barnier a adopté une approche adaptée aux oppositions, y compris le RN. Mais cette rencontre avec Marine Le Pen intervient dans un contexte de tensions croissantes. Le RN déplore un manque de considération de la part du gouvernement. « Michel Barnier nous ignore », a récemment déclaré le secrétaire général du groupe RN, Renaud Labaye. Pourtant, Matignon affirme que cette série d’entretiens, qui inclut également des échanges avec les autres groupes parlementaires, était prévue de longue date.
Le budget, principal sujet de discorde, cristallise les oppositions. Le RN exige des mesures concrètes pour alléger le coût de la vie et s’opposer fermement à la hausse de la taxe sur l’électricité. Cette mesure, qui visait à économiser 3 milliards d’euros pour les finances publiques, a été rejetée en bloc par l’opposition, y compris les Républicains. Michel Barnier semble prêt à revoir cette proposition, mais refuse de céder aux demandes du RN.
Le RN, entre pression et calcul politique
En coulisses, les négociations sont délicates. Le RN cherche à capitaliser sur ses revendications sans pour autant apparaître comme le fossoyeur du gouvernement en pleine période de fêtes. « Plonger la France dans un chaos économique sans gouvernement ni budget serait irresponsable », a commenté un député macroniste, estimant que le RN pourrait ne pas concrétiser ses menaces. Pourtant, l’extrême droite maintient la pression. Marine Le Pen pourrait abattre sa carte de la censure si les conditions sont favorables à une démonstration de force politique. « Michel Barnier crée les conditions d’une censure », a déclaré Sébastien Chenu, alimentant un suspense qui durera jusqu’à mi-décembre, lorsque la motion de censure sera débattue.
Face à ces menaces, l’exécutif devra faire preuve d’adresse. Renoncer à certaines mesures budgétaires pour apaiser les oppositions tout en conservant une ligne ferme avec le RN est un exercice d’équilibriste. Pour Marine Le Pen, cette séquence pourrait renforcer sa posture de cheffe d’une opposition crédible et déterminée à défendre les intérêts des Français. Le rendez-vous de lundi matin à Matignon marquera le coup d’envoi d’un mois sous haute tension. Si le RN choisit de voter la censure, cela pourrait bien redéfinir les rapports de force politique en France et précipiter le pays dans une crise institutionnelle majeure.