Le dernier baromètre La Croix-Verian-La Poste dévoile que seulement 32 % des Français font confiance à la presse pour traiter des grands sujets d’actualité. Une méfiance qui s’accompagne d’un intérêt toujours marqué pour l’information, mais également d’une fatigue croissante face à la manière dont elle est présentée. Décryptage des enseignements majeurs de cette étude.
Une confiance érodée mais un intérêt soutenu
Selon l’étude, 62 % des Français estiment qu’il faut se méfier de ce que disent les médias , une hausse de cinq points par rapport à l’année précédente. Cette méfiance se traduit par une remise en cause de l’indépendance des journalistes face aux sphères politiques et économiques. Guillaume Caline, directeur enjeux publics et opinion chez Verian, souligne que ce défi « reflète une méfiance globale envers les institutions ». Pourtant, l’intérêt pour l’actualité reste fort, avec 76 % des sondés affirmant la suivre avec grand intérêt . Ce paradoxe illustre une relation ambivalente : les Français restent avides d’information, mais expriment une lassitude grandissante vis-à-vis du ton et des angles choisis par les médias.
La fatigue face à l’actualité est un phénomène en progression. 51 % des sondés déclarent ressentir un rejet ou une lassitude, liée notamment à la répétition des sujets et au ton souvent anxiogène des médias. Guillaume Caline explique que les Français « jugent que les médias sont trop négatifs », ce qui génère un sentiment de saturation. De plus, 41 % des sondés se sentent angoissés ou impuissants face aux informations, un chiffre en hausse par rapport à l’année précédente. Cette angoisse pousse les Français à réclamer un changement de paradigme, avec une attente marquée pour davantage de journalisme de solution et d’informations porteuses d’espoir.
Des attentes spécifiques : environnement et faits divers
Les Français souhaitent voir davantage de diversité dans les sujets traités par les médias. 41 % des sondés estiment que les médias parlent trop de politique , contre seulement 27 % pour les questions religieuses ou sportives. À l’inverse, 69 % reprochent aux médias de ne pas assez traiter des solutions face au changement climatique , et 41 % réclament plus de sujets liés à l’environnement . En parallèle, l’intérêt pour les faits divers reste très fort, avec 63 % des Français affirmant suivre ces sujets . Cependant, 75 % estiment que leur médiatisation excessive contribue à un sentiment d’insécurité . Cette ambivalence montre une demande pour des récits captivants, mais avec une gestion plus équilibrée de leur couverture.
Les médias traditionnels bénéficient encore d’une certaine confiance, notamment pour les journaux télévisés (69 %) et la presse régionale (63 %). À l’inverse, les réseaux sociaux suscitent une méfiance généralisée, avec 64 % des sondés déclarant ne pas leur faire confiance . Guillaume Caline note que « les réseaux sociaux sont perçus comme des foyers de désinformation », un sentiment renforcé par les fake news qui pullulent sur ces plateformes. Les jeunes générations se distinguent par leur rapport aux médias. 64 % des 18-24 ans estiment qu’il est positif que les journalistes prennent position , contre 57 % des plus de 65 ans qui pensent le contraire. Ce fossé générationnel reflète une évolution des attentes : les jeunes recherchent des points de vue affirmés et des analyses engageantes.
Liberté d'expression : un consensus fragile
Le baromètre révèle que 77 % des Français jugent que la liberté d’expression est de plus en plus menacée , un sentiment particulièrement marqué chez les plus de 35 ans (79 %). Malgré cela, 59 % estiment essentiel de garantir la liberté d’expression et le droit à la caricature , même si cela peut heurter certaines sensibilités. Ce chiffre tombe à 48 % chez les 18-24 ans, révélant une tension entre la liberté d’expression et le respect des sensibilités individuelles.
Enfin, l’intelligence artificielle (IA) suscite des craintes quant à son utilisation dans les médias. 43 % des Français s’opposent à son utilisation pour automatiser la production de contenu , craignant une perte de l’analyse humaine (41 %) et une augmentation des fausses informations (37 %). Cependant, 41 % des 18-24 ans voient en l’IA une opportunité d’améliorer la qualité de l’information, contre seulement 28 % des plus de 65 ans.