Deux élues LFI à bord, un gouvernement qui dénonce une opération « irresponsable » et une crise humanitaire toujours plus grave : la tentative du Handala de briser le blocus israélien à Gaza suscite un vif débat. Humanitaire sincère ou provocation politique ? Décryptage.
Le 13 juillet dernier, un voilier baptisé Handala a quitté le port sicilien de Syracuse avec un objectif clair : briser le blocus imposé par Israël à la bande de Gaza. À son bord, 18 militants, dont trois journalistes et deux élues de La France Insoumise (LFI), Emma Fourreau (eurodéputée) et Gabrielle Cathala (députée du Val-d’Oise), embarquées quelques jours plus tard lors d’une escale à Gallipoli.
Une initiative militante sous haute tension
Cette expédition, organisée par le collectif Flottille de la liberté, entend livrer une aide humanitaire symbolique aux populations palestiniennes, asphyxiées par un blocus renforcé depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023. Une démarche que Gabrielle Cathala assume pleinement, expliquant vouloir « garder les yeux rivés sur Gaza, même en plein été ». De son côté, Emma Fourreau, plus discrète jusqu’alors, semble profiter de la médiatisation autour de l’événement pour asseoir sa notoriété, multipliant les publications sur les réseaux sociaux, à l’image de Rima Hassan lors de la précédente tentative avec le voilier Madleen.
Mais cette initiative a immédiatement fait réagir le gouvernement français. Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, l’a qualifiée de « dangereuse » et « irresponsable », affirmant qu’elle ne contribuerait « en rien à résoudre la catastrophe humanitaire en cours ». Il a rappelé que les déplacements vers Gaza sont formellement déconseillés, y compris pour les parlementaires. Une prise de position qui alimente encore un peu plus les tensions déjà vives entre le gouvernement et la gauche radicale.
Une opération symbolique… mais diplomatiquement explosive
Le Handala ne transporte qu’une quantité limitée de matériel médical et de produits de première nécessité, mais sa mission est avant tout politique : dénoncer le blocus, attirer l’attention médiatique sur la situation à Gaza et confronter Israël à une opération pacifique à forte portée symbolique. Ce n’est pas la première fois qu’une flottille tente de forcer l’accès maritime à la bande de Gaza. Le précédent navire, le Madleen, avait été intercepté début juin par la marine israélienne à plus de 180 kilomètres des côtes. À son bord : des militants internationaux, dont Greta Thunberg et Rima Hassan, désormais visage médiatique de LFI sur la question palestinienne.
À chaque fois, les passagers sont arrêtés puis expulsés, sans violences mais avec une fermeté diplomatique. Cette fois encore, Israël a prévenu qu’il ne laisserait pas passer ce type de mission. Pour le gouvernement français, l’affaire est d’autant plus délicate qu’elle implique des élus de la République : leur protection consulaire devra être assurée en cas d’incident, même si l’opération n’est pas cautionnée. La participation d’Emma Fourreau, plus jeune eurodéputée française, n’est pas anodine : militante écologique, pro-palestinienne et défenseuse du bien-être animal, elle incarne une nouvelle génération d’élus LFI, très actifs sur les réseaux et engagés sur des sujets internationaux.
Si le Handala parvient à s’approcher de Gaza – ce qui reste hautement improbable –, il pourrait marquer un tournant symbolique dans la manière dont les élus français s’engagent sur la question israélo-palestinienne. Mais en cas d’interception, le scénario le plus probable, la tension politique entre LFI et le gouvernement français pourrait encore s’accentuer, nourrissant les débats sur la légitimité de ces initiatives individuelles dans un contexte aussi explosif.