Le 9 août 2025, un nouveau chapitre s’ouvre dans la politique migratoire de l’Europe : le Royaume-Uni et la France déploient officiellement le mécanisme dit « One in, One Out », une entente bilatérale visant à faire face à la crise des traversées de la Manche. Selon cet accord, tous les migrants en situation irrégulière ayant tenté de rejoindre le Royaume-Uni par bateau pourront être renvoyés vers la France, mais un nombre équivalent sera accueilli dans l’autre sens, à condition qu’ils n’aient pas déjà tenté la traversée et passent des examens de sécurité préalables. Cette initiative marque la première collaboration concrète de taille depuis l’annulation du projet controversé de déportation vers le Rwanda — un tournant comparé à un « test grandeur nature » du contrôle migratoire du Labour de Sir Keir Starmer.
Une réponse politique forte à une situation migratoire explosive
Depuis 2024, le nombre de migrants tentant la traversée de la Manche à bord d’embarcations de fortune a explosé, avec plus de 20 000 arrivées enregistrées, une hausse spectaculaire de plus de 50 % par rapport à l’année précédente. Face à ce constat, l’accord « One in, One Out », annoncé en juillet par le Premier ministre Keir Starmer et le Président Emmanuel Macron, vise à instaurer un équilibre strict : chaque personne refoulée vers la France pourrait être compensée par l’accueil d’un migrant français acceptable au Royaume-Uni.
Dans cette optique, le mécanisme initial prévoit une phase test d’une soixantaine de personnes par semaine, ce qui, bien que limité dans l’absolu, représente un signal politique fort. Il s’agit tant de lutter contre les réseaux de passeurs, que de proposer des voies plus régulées, au nom de la sécurité internationale et du contrôle efficace des frontières. L’initiative est cependant déjà jugée insuffisante par certains acteurs associatifs et partis de l’opposition, qui dénoncent des risques d’inhumanité, de complexité juridique et de signal dangereux pour les droits d’asile.
Enjeux juridiques, humains et diplomatiques du dispositif
Un enjeu majeur de ce mécanisme réside dans son application judiciaire concrète : les migrants concernés doivent être déboutés s’ils ont déjà tenté la traversée ou s’ils ne présentent pas de documents d’identité valides, selon la volonté affichée de Londres. Le Ministère de l’Intérieur britannique avance que les premières détentions — environ 155 migrants — ont déjà eu lieu, les personnes étant placées en centre de rétention, en attendant d’éventuelles déportations dès le 24 août, sous réserve de procédures judiciaires en cours.
Mais derrière la technicité de ce dispositif technique, c’est la dimension diplomatique qui interpelle. Cet accord inédit pourrait ouvrir une nouvelle ère de coopération entre Paris et Londres, longtemps éclipsée par les tensions post-Brexit. Il pourrait aussi devenir un modèle à suivre en Europe, notamment pour les États confrontés à des routes migratoires similaires. À l’inverse, ses détracteurs — notamment des ONG, des organisations de défense des réfugiés et l’opposition — y voient une contrevérité morale et légale, soulignant que le Royaume-Uni externalise ses responsabilités, sans garantir la protection des demandes d’asile.
Cela marque un tournant diplomatique et politique majeur : avec le lancement du mécanisme « One in, One Out », la gestion migratoire transmanche entre dans une nouvelle phase, où la coopération tente de conjuguer contrôle et responsabilité. À première vue, cette initiative incarne une réponse ferme aux pressions migratoires, un geste de rééquilibrage des responsabilités, et une manière d’établir des voies régulées plus sûres.
Pour autant, elle soulève des questions cruciales sur le respect des droits fondamentaux, l’efficience juridique et la durabilité de la coopération européenne. L’avenir nous dira si ce système restera un test expérimental ou si, au contraire, il se transformera en référence incontournable dans la lutte contre l’immigration illégale.