Sur une heure de grande écoute, devant près de 2 millions de téléspectateurs, Cyril Hanouna a affirmé que concernant l’affaire Lola, il faudrait permettre un procès immédiat et demander une peine maximale pour l’agresseur. Voici pourquoi c’est dangereux. 

 

Il y a une semaine, le 14 octobre, Lola, une jeune fille de douze ans se faisait sauvagement tuer puis a été retrouvée dans une malle en plastique, dans le 19ème arrondissement de Paris. C’est un SDF qui a retrouvé cette malle aux alentours de 23 heures, le jour-même, dans laquelle se trouve des papiers avec les inscriptions 1 et 0 disposés au niveau des pieds de la petite Lola, morte par asphyxie. La principale suspecte est très vite interpellée. Il s’agit de Dahbia.B, 24 ans, au profil très instable. Depuis, entre récupérations politiques et débats télévisés, le sujet de la mort effroyable de Lola ne cesse d’être discuté. Et pas toujours dans les meilleures conditions.

L’audience, au mépris de la justice

Si le monde médiatique s’est emparé de cette terrible affaire , c’est avant tout parce qu’elle a ému la majorité d’entre nous. Et lorsqu’il s’agit de débattre sur l’actualité, Cyril Hanouna n’est jamais bien loin. En effet, depuis le 14 octobre, il a consacré une large partie de temps d’antenne pour discuter du meurtre abominable de Lola. Il avait d’ailleurs fêté en grande pompe son record d’audience suite à l’émission qui avait été dédiée à l’affaire. Une célébration vivement critiquée. Dernièrement, il est revenu sur les faits en posant, comme à son habitude et à l’image de la construction de l’émission, une question à laquelle devait répondre ses chroniqueurs.

À la question, «faut-il juger les fous » posée sur le plateau de Cyril Hanouna, le principal intéressé s’est empressé de prôner la mise en place d’une justice expéditive :

pour moi, le procès doit se faire immédiatement, en quelques heures et terminé, c’est perpétuité directe.

Des propos immédiatement repris par Georges Fenech, ancien magistrat. « C’est de la démagogie ça. On est dans un État de droit, il y a des procédures. Il (le suspect) a le droit à une défense. Quoiqu’il ait fait. Même Klaus Barbie a était défendu par Maître Vergès » lui lance-t-il. Un discours qui n’est pas du goût de Cyril Hanouna : « Aujourd’hui, la société a changé et on ne peut plus laisser des gens comme ça être jugés pendant des semaines et des semaines et ils sont après dans un hôpital psy et ils restent pendant trois/quatre ans et après il ressortent (…) s’insurge-t-il. « Ça s’appelle la loi du Talion » réplique l’ancien magistrat.

L’importance d’une justice respectée

« C’est ça la conception que l’on a de l’état de droit dans notre pays ? Monsieur Hanouna dit, ’ça, c’est l’époque dans laquelle nous vivons, il faut s’adapter à l’époque’ Mais si c’est le cas, on est tombé bien bas » a déploré le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti sur le plateau de C à Vous, l’air démunit et d’ajouter que ces déclarations n’ont pourvut que de flatter « les bas instincts pour faire de l’audience ». En effet, en France; la justice expéditive n’existe pas pour la simple et bonne raison qu’elle garantit le droit d’être défendu. La preuve par le V13, le procès des attentats du 13 novembre 2015 qui a duré neuf mois et qui a notamment laissé la place aux récits des accusés. Une garantie importante pour la démocratie dans laquelle nous vivons.

En France, la justice est garante de nos droits. L’avocat, sert notamment à faire respecter le droit fondamental à être défendu. La justice est la garantie absolue de notre dignité. Que l’on soit non-coupable ou coupable. Défendre une personne qui est coupable, ne revient pas à éviter la condamnation. La défense d’une personne qui avoue elle-même sa culpabilité, quoiqu’elle ait fait, est la caution de notre civilisation. Sa défense ne s’appuie pas sur le crime, mais sur sa personne. Sa défense permettra d’appliquer une sanction adaptée à l’auteur du crime. Mais sa défense sera également prépondérante que les victimes et les familles des victimes puissent comprendre et détenir la vérité, l’un des éléments les plus importants lors d’un procès. Tout cela concourt à rendre une décision juste.

‘Est-ce qu’il y a une limite ? Des causes que tu refuserais de défendre ?’ « Si tu poses cette question, ça veut dire que tu n’as pas compris ce que c’est d’être avocat. Je ne défends aucune cause, mais je ne refuse aucun accusé. » V13, Emmanuel Carrère. 

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