Vendredi 23 décembre, sur les coups de 10 heures, les habitants du 10ème arrondissement et plus précisément de la rue d’Enghien à Paris, ont entendu des bruits de détonation. C’est le centre culturel kurde qui a été pris pour cible. William M, a alors ouvert le feu sur une femme et deux hommes qui se tenaient devant le centre. Il a poursuivi dans la même rue, blessant trois autres hommes. L’auteur des faits s’était d’abord rendu vers 6h50 du matin à Saint-Denis, muni d’un pistolet automatique et de nombreuses munitions « pour commettre des meurtres sur des personnes étrangères », rapporte le parquet de Paris dans un communiqué.

Le poids des mots

Depuis l’attaque qui a eu lieu le vendredi 23 décembre, de nombreuses personnes déplorent le traitement médiatique réservé à l’affaire. « Fusillade », « tirs meurtriers », « attaque », « coups de feu »… voilà ce qu’on a pu lire dans les médias pour qualifier cet événement tragique. Le Figaro et BFMTV ont donc préféré utiliser le terme « fusillade » qui, pourtant, traduit d’un « échange de coups de feu » selon le Larousse. Le Monde, a de son côté, utilisé le terme d’attaque , plus approprié dans une situation où une seule personne ouvre le feu. Et pour la majorité, l’incompréhension est la suivante : pourquoi ne pas avoir qualifié cette « attaque » d’attentat ? En effet, il semble que les mots peuvent avoir un réel pouvoir et notamment ajouter au malheur de certains.

Mais alors pourquoi les médias n’ont pas qualifié ces « tirs meurtriers » d’acte terroriste ? Tout simplement parce que le Parquet national anti terroriste (Pnat) ne s’est pas saisi du dossier. Pour qualifier un acte d’attentat, il faut se référer à l’article 412-1 du Code pénal. Selon ce dernier, la notion d’attentat recouvre des « actes de violence de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l’intégrité du territoire national ». Du côté de l’article 421-1, du Code pénal, les infractions relatives aux actes terroristes sont définies ainsi : « lorsqu’elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ». Une définition à laquelle semble correspondre les actes commis par l’homme de 69 ans.

Quand parle-t-on d’attentat ?

©pexels

La juridiction spécialisée a expliqué fonder son analyse « au cas par cas » sur différents paramètres : « Les motivations de l’auteur, sa personnalité, s’il est connu des services spécialisés ou en relation avec des personnes connues des services spécialisés pour leur appartenance à des groupes terroristes ou extrémistes, son état psychologique et psychiatrique et enfin la gravité de l’acte ainsi que son mode opératoire ».

« Soit on a affaire à un déséquilibré raciste qui voulait s’en prendre à des étrangers, et dans ce cas le caractère terroriste ne sera pas retenu, soit on découvre qu’il voulait s’en prendre à la communauté kurde en particulier ou qu’il a été approché par les services turcs et les faits seront requalifiés en lien avec une entreprise terroriste », résume auprès du Parisien William Julié, avocat spécialiste en droit pénal. Pour y voir plus clair, Mediapart, qui n’a pas hésité à parler d’attentat, a demandé à la Pnat quelques précisions sur le caractère terroriste d’un acte. Et avant de qualifier un acte d’attentat, il faut regarder « les motivations de l’auteur, sa personnalité, s’il est connu des services spécialisés ou en relation avec des personnes connues des services spécialisés pour leur appartenance à des groupes terroristes ou extrémistes, son état psychologique et psychiatrique et enfin la gravité de l’acte ainsi que son mode opératoire ». En substance, la priorité, lorsqu’un homme agit seul, est de s’assurer qu’il n’appartient à aucune organisation terroriste.

Une chose est certaine : le tireur avait pour motivation de s’en prendre à des étrangers. Et si Gérald Darmanin a affirmé qu’il ne disposait d’aucune information qui le relierait à l’ultra droite, il est pourtant connu des services de police pour avoir tenté d’agresser des migrants au sabre à Paris en 2021. Lors de sa garde à vue, il a d’ailleurs reconnu ressentir une « haine des étrangers devenue complètement pathologique » après avoir été cambriolé en 2016. « J’ai toujours eu envie d’assassiner des migrants, des étrangers, depuis ce cambriolage », a-t-il déclaré aux enquêteurs, précisant également être « dépressif » et  “suicidaire”. Il a également reconnu avoir envisagé d’aller s’en prendre à des étrangers à Saint-Denis, avant de finalement renoncer.

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