Le coronavirus a fait bien des dégâts. Et a opéré bien des changements. L’importance retrouvée du temps pour soi, la prise en charge de sa santé mentale, les répercussions sur la santé à long terme, l’envie de faire plus de sport, de manger mieux ou encore, du côté des femmes, d’enlever le soutien-gorge. Aujourd’hui, on assiste à un nouveau phénomène lié, en partie, à cette période de crise sanitaire : la chute libre de vente de talons.
Le confort au détriment du style ?
Pendant la crise du Covid-19, femmes et hommes ont délaissé costumes et chaussures pour les pyjamas et les pantoufles. Et tout comme le soutien-gorge qui s’est révélé n’être absolument pas indispensable, les talons semblent être restés au placard et ne jamais en ressortir. En effet, en 2020, les ventes de talons ont considérablement chuté. On estime cette chute à 45%, d’après le NPD Group, entreprise américaine d’études de marché. La mise en place du télétravail généralisé est la cause principale. « Les talons, c’est vraiment le monde d’avant. Quand on bosse chez soi, il n’a aucun intérêt à se faire mal aux pieds. Au travail, on est moins protocolaire qu’avant. Si les hommes ne mettent plus de cravates, pourquoi nous, on porterait encore des talons ? », a expliqué Laura, travaillant dans un cabinet d’assurance à Metz dans les colonnes de 20 minutes. Mais le télétravail n’a pas été la seule raison de ce changement d’habitude.
Si l’envie d’être confortable y est pour beaucoup, le monde a évolué. Ainsi, dans une étude menée en 2021, par le cabinet spécialisé IWG, 59% des personnes interrogées déclarent que les tenues formelles pour aller travailler relèvent d’une époque révolue. Parmi eux, 64 % des salariés souhaitent aujourd’hui opter pour des vêtements confortables au bureau. Voici la preuve, s’il en fallait une, que la crise sanitaire a rendu possible la victoire du confort. En 2023, on préfère donc les UGG aux Louboutin. Et si le déclin du talon haut est plus prononcé depuis le confinement, il s’avère que cette pente ascendante est observée depuis plus longtemps, avec l’avènement de la sneakers. Cool et chic, elle s’est déclinée à l’infini et s’est invitée dans tous les placards. « Une paire de sneakers demeure aujourd’hui un accessoire de mode, contrairement aux baskets d’il y a 15 ou 20 ans » explique Sophie Malagola, créatrice de mode et ancienne directrice des collections chez DIM et chez Etam.
Talons et vie urbaine : l’impossible compatibilité ?
« Les talons, c’est comme le métro. J’ai arrêté de prendre les transports en commun pendant les confinements et physiquement je ne peux plus les reprendre », confie ainsi Leslie, une jeune Parisienne de 32 ans, à 20 minutes. Une affirmation confirmée par Sophie Malagola : « Il est (le port des talons) inadapté aux modes de vie actuels. Aujourd’hui, une femme doit courir derrière le bus, prendre les escaliers, marcher beaucoup en ville. On ne prend plus la voiture pour sortir juste en face du travail, le mode de vie ultra-urbain change les choses ». Il est important également de noter que la femme est désireuse de se réapproprier son corps. En effet, pendant de nombreuses années, les talons étaient une obligation sociale. Une femme devait être perchée haut. Sans quoi, elle n’était ni désirable, ni prise au sérieux. Il existe des corps de métier dans lesquels il est impératif de venir travailler en jupe de tailleur et en talons. Cela est de moins en moins accepté. L’idée ? Porter des talons quand la femme le souhaite et non quand elle s’y sent forcée. Des Japonaises ont, à ce propos, lancé le hashtag #Kutoo pour dénoncer l’obligation de porter des chaussures à talons au travail. En revanche, si le talon est boudé en journée, il reste très populaire pour sortir. L’intérêt de sortir en talons le soir est donc peut-être d’autant plus important puisque le talon devient alors un accessoire que la femme porte pour des occasions spéciales. Une logique conformée par Sophie Malagola : la chaussure à talon « est encore très appréciée pour les tenues de soirée, cela dénote encore plus qu’avant et permet donc un meilleur effet ».