Un atterrissage difficile. Ce mardi 19 décembre, la loi « immigration » a finalement été adoptée au Parlement grâce à un compromis entre la majorité et les Républicains et après que le Sénat a, sans surprise, voté pour ce texte. Très largement durci, le texte a été salué par l’extrême droite, ce qui a provoqué de vives réactions au sein de l’Assemblée nationale.

Gérald Darmanin s’est félicité d’un « texte fort ». Il a salué un « long combat pour mieux intégrer les étrangers et expulser ceux qui commettent des actes de délinquance. Un texte fort et ferme. Sans les voix des députés RN », a-t-il écrit sur le réseau social X à l’issue du vote à l’Assemblée nationale où le projet de loi a été adopté par 349 voix pour et 186 contre, après un vote favorable du Sénat plus tôt dans la soirée. Voici un aperçu de ce que contient la loi immigration, qui va considérablement entraver l’intégration des étrangers.

Restriction du regroupement familial

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Il faudra qu’un étranger résidant en France attende maintenant 24 mois sur le territoire, contre 18, pour espérer faire venir sa famille. Une possibilité conditionnée à des ressources « stables, régulières et suffisantes », avoir accès à l’assurance maladie et en cas d’union ou de concubinage, avoir un conjoint d’au moins 21 ans et non 18 ans comme c’est le cas aujourd’hui. Enfin, les proches devront au préalable apprendre le français et passer un examen pour venir en France.

« Le regroupement familial est déjà encadré : on en peut faire venir que les conjoints et conjointes et les enfants mineurs (…) Ce texte est la traduction d’une représentation fantasme de l’immigration, avec cette idée que les gens viennent ici pour installer leurs proches ensuite, au mépris de droits fondamentaux, notamment celui de vivre en famille », décrypte Hélène Soupios-David, directrice de plaidoyer à France Terre d’asile, dans les colonnes de Libération.

Le délit de séjour irrégulier rétablit

Alors que le délit de séjour irrégulier avait été supprimé sous François Hollande, le voilà introduit par le gouvernement. Toute personne présente illégalement en France pourra désormais se voir infliger une amende à hauteur de 3 750 euros, et de trois ans d’interdiction du territoire, sans peine de prison.

Une caution pour les étudiants étrangers

Dorénavant, les étudiants internationaux souhaitant obtenir un visa étudiant pour la France devront verser une garantie financière à l’État français. Cette initiative est destinée à compenser d’éventuels frais liés à leur éloignement du territoire. Un texte qui n’aurait pour effet uniquement de dissuader les étudiants du monde entier de choisir la France comme destination d’études.

Restrictions pour les aides médicales des étrangers

Bien que l’Aide médicale d’Etat ait finalement été maintenue, des restrictions pour les étrangers malades vont être mises en place. En revanche, il existe bel et bien une restriction de l’accès au titre de séjour pour les étrangers malades. Il ne sera plus possible de venir en France pour se faire soigner sauf s’il n’existe pas « de traitement approprié » dans le pays d’origine du pays. De plus, la prise en charge par la sécurité sociale sera également exclue si le malade a des ressources considérées comme suffisantes.

D’après un courrier d’Elisabeth Borne, un projet de loi sur l’AME devrait être présenté au début de l’année 2024.

Expulsion des étrangers coupables de délits

Les parents d’enfants français, les conjoints de citoyens français et les étrangers résidant en France depuis dix ans bénéficient d’une protection partielle. Ils peuvent être expulsés uniquement en cas de menace pour la sécurité de l’État, s’ils ont été condamnés à une peine de cinq ans de prison, ou s’ils pratiquent la polygamie. Le texte inclut désormais également les condamnations pour violences conjugales ou familiales.

Les personnes étrangères sous protection conditionnelle peuvent être expulsées si elles sont reconnues coupables de délits passibles de plus de trois ans d’emprisonnement (contre cinq ans auparavant), ou si elles se rendent coupables de violences domestiques ou à l’encontre d’une personne détenant un mandat électif. Cette mesure s’applique également en cas de séjour irrégulier sur le territoire.

Le droit du sol ne sera plus automatiquement appliqué

La règle du droit du sol, qui stipule qu’une personne née en France acquiert automatiquement la nationalité française, n’était pas incluse dans la proposition originale du gouvernement. Cependant, lors des discussions au Sénat, l’application automatique de ce droit a été supprimée, et les sénateurs ont réussi à imposer cette modification. Désormais, un individu né en France de parents étrangers devra formuler une demande pour acquérir la nationalité française entre ses 16 et 18 ans. De plus, la droite a réussi à s’assurer qu’une personne reconnue coupable de crime ne pourra pas obtenir la nationalité française.

Obligation de quitter le territoire français pour les étrangers dont l’asile a été refusé

Lorsqu’un étranger en situation irrégulière voit sa demande d’asile refusée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), l’autorité administrative est tenue d’émettre une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) dans un délai déterminé. Cette procédure ne prévoit pas de délai supplémentaire en cas de recours contre le rejet de la demande d’asile devant la Cour nationale du droit d’asile. Par ailleurs, cette mesure inclut la suspension des soins médicaux pour les étrangers ayant définitivement été déboutés de leur demande d’asile. L’obligation de quitter le territoire pourrait être évitée si l’administration « envisage d’admettre l’étranger au séjour pour un autre motif ».

Titre de séjour conditionné au respect des « principes de la République »

Un nouvel élément conditionne désormais la délivrance, le renouvellement ou le retrait des titres de séjour : il s’agit de l’obligation pour le demandeur de signer un « contrat d’engagement au respect des principes de la République ». Ce contrat exige le respect de valeurs telles que la liberté personnelle, l’égalité des sexes, et les symboles républicains. Le refus de signer ce contrat ou un comportement allant à son encontre peut entraîner le refus de délivrance d’un titre de séjour. Des infractions graves à ce contrat peuvent aussi mener au retrait ou au non-renouvellement d’un titre. Toutefois, le refus automatique de renouvellement pour non-respect du contrat a été écarté dans le texte final.

Une trentaine de mesures contraires à la Constitution

Ce mercredi 20 décembre, la Première ministre, Elisabeth Borne a admis que certaines parties du projet de loi sur l’immigration pourraient ne pas être conformes à la Constitution. Elle a cité comme exemple une disposition exigeant des compétences en français pour les conjoints étrangers (canadiens ou japonais, par exemple) souhaitant rejoindre la France. Elle a indiqué que le gouvernement consultera le Conseil constitutionnel à ce sujet. Selon, Sacha Houlié, président de la commission des lois, environ trente mesures pourraient être inconstitutionnelles.

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