C’était la proposition qui faisait polémique. Alors que les députés européens se sont prononcé mercredi 28 février pour une réforme des règles européennes concernant le permis de conduire, ils ont rejeté une proposition qui avait suscité de vives tensions, notamment en France.
Pas de visite médicale tous les 15 ans
La mesure, défendue par l’eurodéputée Europe Ecologie Karima Delli, présidente de la commission des transports et rapporteuse du texte, consistait à conditionner l’octroi du permis à une vicinale médicale pendant laquelle un examen de la vue, de l’ouïe et des réflexes seraient réalisés. Cet examen serait la condition sine qua non pour obtenir son permis mais également pour le conserver. L’idée ? Il faudrait le renouveler tous les quinze ans. Mais cette proposition a finalement été rejetée ce mercredi 28 février.
« Les députés ont convenu que les permis de conduire devraient être valables pendant au moins quinze ans pour les motos et les voitures, et cinq ans pour les camions et les bus. Ils ne sont pas favorables à la réduction de la validité des permis de conduire pour les personnes âgées – comme le propose la Commission – afin d’éviter les discriminations et de garantir leur droit à la libre circulation et à la participation à la vie économique et sociale », dit le Parlement dans un communiqué.
Les parlementaires ont par ailleurs remplacé cette proposition par une auto-évaluation du conducteur et ont laissé aux Etats membres de l’Union européenne (UE) la possibilité d’instaurer ou non un examen médical. « Les députés ont accepté que les conducteurs évaluent leur propre aptitude à conduire lors de la délivrance et du renouvellement du permis de conduire, laissant les pays de l’UE décider si l’auto-évaluation doit être remplacée par un examen médical avec un ensemble minimum de contrôles sur la vue et les conditions cardiovasculaires des conducteurs, entre autres », complète-t-il avant de rappeler l’importance de « déployer davantage d’efforts pour sensibiliser le public aux signaux mentaux et physiques qui peuvent mettre une personne en danger lorsqu’elle conduit ».
« Manque cruel de courage politique »
Pour défendre sa position, Karima Delli à rappeler que « cette proposition ne vise pas à embêter des gens, mais à sauver des vies, des familles d’accident qui ne devraient pas avoir lieu ». À droite, le risque de privation de liberté est pointé du doigt. « L’Europe est à sa place quand elle améliore la vie des gens, pas quand elle la complique en s’arrogeant des prérogatives au motif d’harmoniser des pratiques », a réagi l’eurodéputé LR François-Xavier Bellamy. Les élus français des Républicains et du Rassemblement national étaient majoritairement opposés à cette mesure. Ce vote est « une déception, une occasion manquée », a de son côté regretté l’eurodéputé Renaissance Dominique Riquet.
Pauline Déroulède, qui a été percutée par la voiture d’une nonagénaire, et qui a perdu sa jambe, soutenait fermement la proposition. « Il savait qu’il n’était plus capable de conduire mais il repoussait l’échéance. Il m’a dit que s’il y avait eu une loi, il l’aurait respectée », a-t-elle déploré lors d’une conférence de presse donnée après le vote. Elle a ensuite dénoncé un « manque cruel de courage politique » et « des jeux politiques ». Du côté des associations des automobilistes, la colère se fait sentir. L’association française des usagers de la route 40 millions d’automobilistes a jugé la mesure « ouvertement hostile aux automobilistes ».