Depuis 24 heures, la constitution du premier gouvernement de Michel Barnier s’apparente à un véritable casse-tête. L’ancien négociateur en chef du Brexit, récemment nommé Premier ministre par Emmanuel Macron, fait face à des tensions croissantes au sein de la majorité présidentielle. Alors que ses relations avec sa famille politique d’origine, Les Républicains, semblent solides, celles avec les leaders du camp macroniste se sont détériorées. Le point de friction ? La composition de son équipe gouvernementale, largement dominée par des figures de la droite républicaine, laissant peu de place aux anciens alliés d’Ensemble pour la République.
Une équipe à majorité républicaine qui crée la discorde
Lors de leur tête-à-tête à l’Élysée ce mardi 17 septembre, selon les informations de RTL, Michel Barnier a présenté à Emmanuel Macron une première liste de ministres potentiels. Parmi les noms proposés, des figures majeures des Républicains, comme Laurent Wauquiez, pressenti pour diriger un ministère élargi de l’Économie, Bruno Retailleau pour l’Intérieur, et Annie Genevard au ministère de l’Agriculture. Selon cette première mouture, les personnalités de droite républicaine occuperaient près de la moitié des postes clés du gouvernement, laissant les membres de l’ancienne majorité présidentielle se partager le reste des portefeuilles.
Cette répartition a provoqué des grincements de dents au sein du camp présidentiel. « C’est la multiplication des pains. Avec 47 députés, ils pensent qu’ils peuvent en faire 289 », a ironisé un cadre macroniste, soulignant que le groupe Ensemble pour la République dispose du double de députés par rapport à la Droite Républicaine. Le président Macron lui-même, selon des sources proches, a exprimé son mécontentement face à ce qu’il considère comme un « gouvernement monocolore ». Il a rappelé à Michel Barnier la ligne directrice définie lors de sa nomination : viser l’union nationale et respecter les équilibres politiques. Une consigne qui, selon plusieurs observateurs, semble pour l’instant négligée au profit de la droite républicaine.
Barnier face à la complexité des équilibres politiques
Michel Barnier, fort de ses cinquante années de vie politique, sait que les alliances sont éphémères et qu’il est parfois plus important de ne pas se faire d’ennemis que de se faire des amis. Cependant, en ces premiers jours de négociations, les défis auxquels il est confronté révèlent la complexité de sa tâche. L’ancien négociateur du Brexit, habitué aux compromis, se retrouve ici face à un jeu de pouvoirs plus subtil. Les tensions internes montrent que les alliances ne sont jamais totalement sûres.
Un conseil lui a d’ailleurs été donné par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie : « Tu as gagné le jackpot en étant nommé, attention maintenant à ne pas faire un gouvernement de minoritaires. » Une mise en garde qui semble opportune alors que Michel Barnier tente d’équilibrer ses nominations entre le centre et la droite, sans pour autant satisfaire pleinement les attentes de chacun. Parmi les mécontents, Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, n’a guère apprécié la manière dont Barnier a géré leur rencontre. Reçu tardivement, Darmanin a eu l’impression d’être mis de côté, une situation qui a alimenté les tensions entre les deux hommes. Sébastien Lecornu, ministre des Armées, a également été refroidi par l’attitude de Barnier, qui lui a rappelé lors d’une rencontre récente un retard passé. Ces frictions, bien que minimes en apparence, témoignent d’une crispation plus large entre le Premier ministre et certains poids lourds du gouvernement sortant.
Un équilibre à trouver dans une Assemblée fragmentée
Michel Barnier doit désormais composer avec une Assemblée nationale émiettée, où les alliances se fragilisent et où chaque camp tente de tirer son épingle du jeu. Sa nomination a été perçue comme un moyen de rassembler autour d’un gouvernement d’union nationale, mais la constitution de cette équipe semble, pour le moment, favoriser principalement les Républicains, au détriment des macronistes. Pour de nombreux observateurs, cette stratégie pourrait s’avérer risquée, notamment si elle ne prend pas en compte la diversité politique qui caractérise la majorité parlementaire actuelle.
Le chemin pour Michel Barnier est semé d’embûches. S’il a su mener les négociations complexes du Brexit avec succès, la composition de son gouvernement pourrait bien se révéler un défi tout aussi ardu. Les désaccords avec Emmanuel Macron et les crispations au sein de la majorité témoignent de l’équilibre précaire que Barnier doit maintenir. Son autorité est indéniable, mais la question demeure : saura-t-il concilier les intérêts divergents des Républicains et des macronistes pour assurer la stabilité de son gouvernement ? Les prochains jours seront décisifs pour l’avenir de cette nouvelle équipe, dont la composition devrait être annoncée officiellement dans les prochaines heures.