Surnommée « Panthère rose », « Pink C » ou encore « coke chinoise », la cocaïne rose séduit de plus en plus de jeunes en France. Derrière ses couleurs vives et ses arômes fruités se cache une drogue de synthèse complexe et dangereuse, qui ne contient en réalité aucune trace de cocaïne. Cette substance a envahi les soirées et les réseaux sociaux depuis son apparition en France en 2021, attirant l’attention des autorités et des spécialistes de la santé qui tirent la sonnette d’alarme sur ses effets dévastateurs.
Un mélange toxique : kétamine, MDMA et autres substances
Contrairement à ce que son nom pourrait suggérer, la cocaïne rose n’a rien à voir avec la cocaïne traditionnelle. Il s’agit en réalité d’un cocktail de substances hallucinogènes et stimulantes, principalement constitué de kétamine , de MDMA (ecstasy) et de caféine . Ce mélange est parfois agrémenté d’autres drogues telles que des hallucinogènes, des opiacés ou des médicaments divers. Les autorités françaises et l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT) précisent que ces composants peuvent également être aromatisés aux goûts de fraise, banane ou passion, améliorant ainsi l’attrait de cette substance auprès des jeunes.
Les effets de la cocaïne rose sont particulièrement puissants et dangereux. Les consommateurs peuvent ressentir des hallucinations intenses, des crises de panique, des épisodes d’anxiété sévère, et des symptômes physiques tels que de la fièvre et des difficultés respiratoires. En raison de la présence de kétamine, des effets dissociatifs violents peuvent également survenir, provoquant une sensation de déconnexion totale avec la réalité, connue sous le nom de « k-hole », une expérience qui peut être terrifiante et très dangereuse.
L’addictologue Pr. Laurent Karila souligne le risque couru pour les jeunes : « Le côté coloré et aromatisé de cette drogue lui donne une image faussement inoffensive, ce qui la rend particulièrement dangereuse. Elle est perçue comme « cool » et amusante sur les réseaux sociaux, mais elle peut entraîner des complications graves, allant jusqu’à l’overdose et la mort. » Ces dangers sont d’autant plus importants que les consommateurs ne savent souvent pas réellement ce qu’ils inhalent ou injectent, pensant avoir acheté de la cocaïne.
Une diffusion rapide à travers la France et au-delà
La cocaïne rose a été signalée pour la première fois en France entre 2021 et 2022, et s’est rapidement répandue dans les régions de l’Île-de-France, l’Auvergne-Rhône-Alpes et l’Occitanie. Son apparition dans les « menus » de certains revendeurs de drogues marque une nouvelle tendance inquiétante, notamment chez les jeunes qui fréquentent les rave parties et les soirées chemsex. Selon le rapport de l’OFDT publié en juin 2023, cette drogue se vend entre 60 et 100 euros le gramme , un prix qui reste relativement accessible pour une population jeune et en quête de nouvelles sensations.
La cocaïne rose n’est pas uniquement un phénomène français ; elle s’est également propagée à l’échelle internationale. En septembre 2023, la police espagnole a réalisé une importante saisie de drogues de synthèse à Ibiza, comprenant 21 kilos de cocaïne rose , aux côtés de 300 kilos d’ecstasy et 212 kilos de kétamine. Cette découverte confirme l’expansion rapide de cette drogue à travers l’Europe, où elle gagne du terrain dans les circuits de fêtes et les clubs.
Selon des rapports, la cocaïne rose était déjà présente en Amérique latine dès 2010, notamment en Colombie, grand producteur de drogues synthétiques. Là-bas, elle est connue sous le nom de « tucibi » (2C-B) , une substance psychédélique qui partage certaines similitudes avec la cocaïne rose en termes d’effets hallucinogènes et de composition chimique. Ce lien historique avec l’Amérique latine pourrait expliquer comment cette drogue a fait progressivement son chemin jusqu’en Europe.
Un enjeu de santé publique et de prévention
Face à la montée en puissance de la cocaïne rose, les autorités sanitaires françaises sont en état d’alerte. La propagation de cette drogue sur les réseaux sociaux et son marketing qui la rend attrayante pour les jeunes générations pose un sérieux défi en termes de santé publique. Les effets de la cocaïne rose sont loin d’être anodins : au-delà des hallucinations et des états dissociatifs, les utilisateurs risquent des dommages physiques graves comme des arrêts cardiaques, des problèmes pulmonaires, des crises d’anxiété extrême et, dans les cas les plus graves, une overdose potentiellement mortelle.
Le Pr. Laurent Karila et d’autres spécialistes insistent sur la nécessité d’une prise de conscience collective sur les dangers de cette drogue. « Il est crucial que les jeunes soient informés des risques réels et qu’ils comprennent que ces substances ne sont pas un simple jeu. La banalisation de la cocaïne rose, à travers des références culturelles ou des contenus sur les réseaux sociaux, constitue une véritable menace pour leur santé et leur sécurité », prévient-il.
Les efforts de prévention doivent se concentrer non seulement sur l’information des risques liés à la consommation de drogues de synthèse, mais aussi sur le renforcement des contrôles et des saisies pour freiner la diffusion de ces substances sur le territoire. Alors que les autorités de lutte pour contenir la progression de cette drogue, les campagnes de sensibilisation sont essentielles pour alerter le public, en particulier les jeunes, sur les dangers bien réels de la cocaïne rose.