Malgré la reconnaissance officielle d’une infraction à ses principes fondamentaux, l’Union européenne a choisi de ne pas sanctionner Israël, préférant miser sur une relance de l’aide humanitaire à Gaza. Une décision qui illustre les profondes divisions entre États membres sur la gestion du conflit.
Lundi 15 juillet, après des semaines de discussions internes, l’Union européenne a admis qu’Israël enfreignait l’article 2 de son accord d’association avec l’UE, qui repose sur le respect des droits humains et des principes démocratiques. Cette reconnaissance, bien que symboliquement forte, n’a pas été suivie de mesures concrètes, notamment de suspension ou de révision de l’accord en question.
L’article 2 est pourtant central : il conditionne l’ensemble des relations commerciales et diplomatiques entre Bruxelles et ses partenaires. En principe, toute violation peut entraîner des sanctions économiques ou diplomatiques. Mais cette fois-ci, l’absence de consensus parmi les Vingt-Sept a bloqué toute réaction coercitive.
Un consensus impossible sur les sanctions
La divergence entre les États membres est flagrante. Tandis que l’Espagne, l’Irlande ou la Belgique appellent depuis plusieurs mois à des sanctions contre Tel-Aviv pour ses opérations militaires dans la bande de Gaza, l’Allemagne, la République tchèque ou encore la Hongrie s’y opposent catégoriquement, évoquant le droit d’Israël à se défendre. Ce blocage reflète un équilibre diplomatique fragile au sein de l’UE, où toute décision en matière de politique étrangère doit être prise à l’unanimité. Sans surprise, la Commission européenne s’est donc contentée d’acter un engagement israélien à autoriser l’acheminement de l’aide humanitaire dans l’enclave palestinienne, sans fixer de calendrier précis.
Face à l’urgence humanitaire à Gaza – aggravée par plusieurs mois d’opérations militaires, de blocus et d’obstacles à l’acheminement des vivres – la priorité de Bruxelles reste l’accès aux civils à une aide de première nécessité. Un engagement a été obtenu d’Israël pour faciliter les livraisons humanitaires via les points de passage, notamment Rafah et Kerem Shalom. Mais de nombreux observateurs restent sceptiques. Sur le terrain, les ONG constatent que les livraisons restent erratiques, fortement contrôlées et insuffisantes. De plus, plusieurs précédents – notamment des bombardements près de convois – ont semé le doute sur la fiabilité des engagements israéliens.
Une position qui divise les opinions publiques
Cette absence de sanctions divise aussi les opinions publiques européennes. Dans plusieurs capitales, des manifestations pro-palestiniennes ont exigé que l’Union européenne suspende ses accords avec Israël, comme elle a pu le faire par le passé avec d’autres États jugés non respectueux des droits humains. En France, en Allemagne ou en Italie, de nombreuses ONG dénoncent une « double standard » européenne, rappelant la rapidité avec laquelle l’UE avait pris des mesures contre la Russie après l’invasion de l’Ukraine. À leurs yeux, le silence politique vis-à-vis de Tel-Aviv sape la crédibilité des principes fondateurs de l’Union.
Ce nouvel épisode met une fois encore en lumière l’impuissance de l’Union européenne sur la scène géopolitique, dès lors que ses membres sont divisés. Si Bruxelles affirme défendre un « ordre international fondé sur le droit », elle peine à le traduire en actes concrets lorsque des intérêts stratégiques ou diplomatiques sont en jeu. En reconnaissant officiellement une violation de l’article 2 sans y associer de conséquences, l’UE s’expose à un discrédit diplomatique, tant aux yeux du monde arabe qu’au sein de sa propre opinion publique.