Âgés de 14 et 16 ans, deux adolescents fascinés par l’État islamique ont été mis en examen début août à Paris pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.
Ils évoquaient des cibles emblématiques comme la tour Eiffel et des synagogues, et discutaient d’un départ pour le jihad. Une affaire qui illustre la radicalisation de plus en plus précoce des jeunes en France.
Des interpellations en plein été
Les deux mineurs, nés en 2008 et 2010, ont été arrêtés en région parisienne les 29 et 30 juillet, dans le cadre d’une enquête ouverte dès le mois d’avril par le Parquet national antiterroriste. Le 1er août, ils ont été mis en examen à Paris pour association de malfaiteurs terroriste criminelle. Selon une source judiciaire, il leur est reproché d’avoir échangé autour de projets d’actions violentes, d’avoir envisagé un départ en zone de jihad et d’avoir diffusé de la propagande islamiste.Les enquêteurs ont découvert que les deux adolescents ne se connaissaient pas dans la vie réelle.
Ils avaient été mis en relation via un groupe Telegram, messagerie chiffrée particulièrement utilisée par les sympathisants jihadistes. Les échanges entre eux montrent une fascination pour l’organisation État islamique et un intérêt marqué pour des contenus de propagande ultra-violente. Très vite, les discussions avaient glissé vers l’idée de passer à l’action. Selon des sources proches du dossier, les deux jeunes avaient exploré le dark web afin de se renseigner sur l’achat d’armes. Ils parlaient également de départs éventuels vers des zones de combat à l’étranger. Leur radicalisation s’était donc construite essentiellement en ligne, sans contact direct avec un réseau structuré.
Des cibles hautement symboliques
Parmi les projets évoqués, certains inquiétaient particulièrement les autorités. Les deux mineurs avaient mentionné la tour Eiffel, monument le plus visité de France et symbole reconnu dans le monde entier. Ils avaient également parlé d’attaquer des synagogues, dans un contexte de multiplication des menaces antisémites. D’après France Télévisions, ils avaient même effectué des recherches précises sur la tour Eiffel, ce qui démontre une intention de viser un lieu à forte charge symbolique. Toutefois, les enquêteurs soulignent que leurs projets en étaient restés à un stade embryonnaire. Aucun repérage n’avait été effectué et aucune logistique concrète n’était en place. Les magistrats du PNAT rappellent néanmoins que de tels discours, même encore peu aboutis, justifient une intervention rapide afin de prévenir tout passage à l’acte.
Cette affaire s’inscrit dans une tendance préoccupante observée depuis quelques années : l’implication croissante de très jeunes profils dans des dossiers liés au terrorisme. Il y a dix ans, les mineurs mis en examen dans ce type d’affaires se comptaient sur les doigts d’une main. Aujourd’hui, la situation est bien différente. Quinze mineurs ont été mis en examen en 2023, dix-huit en 2024, et déjà onze sur le premier semestre 2025. Le PNAT souligne que la jeunesse de ces profils les rend à la fois vulnérables à la propagande et potentiellement dangereux. La radicalisation se fait en ligne, dans des espaces numériques qui échappent souvent au contrôle des familles et des institutions scolaires.
Un défi sécuritaire et sociétal
La mise en examen de ces deux adolescents montre à quel point la menace terroriste persiste en France, même si elle a changé de visage depuis les vagues d’attentats de 2015 et 2016. Les grandes cellules organisées ont laissé place à des individus isolés, parfois mineurs, qui s’embrasent dans la solitude de leur chambre face à des contenus de propagande. Cette évolution pose des défis immenses. Les services antiterroristes doivent détecter très tôt ces parcours de radicalisation, avant qu’ils ne se transforment en projets opérationnels. Mais la question dépasse le seul cadre sécuritaire. Elle interroge aussi le rôle des familles, de l’école et de la société dans la prévention de ces trajectoires à haut risque.
La tour Eiffel et les lieux de culte juifs demeurent des cibles récurrentes pour ceux qui cherchent à frapper symboliquement la France. L’affaire de ces deux mineurs, dont les projets n’étaient pas aboutis mais dont les intentions étaient clairement violentes, rappelle que la vigilance reste indispensable. Derrière ces adolescents, c’est toute une génération exposée à la propagande extrémiste en ligne qui est en jeu.