L’un des plus beaux joyaux de la Corse menacée. En effet, la cité bonifacienne voit les menaces d’un effondrement s’accroître. Alors qu’elle est l’embouchure entre la mer Tyrrhénienne et la mer Méditerranée, va-t-elle céder sous le poids d’une trop grande pression ?
« Un jour, ça s’effondrera sans doute »
Théâtre d’une histoire mêlant les Génois aux Aragonais en passant par les Maures, Bonifacio, a de tout temps, été une place centrale des échanges commerciaux. La pointe méridionale de l’île de beauté possède une très riche histoire dont elle garde désormais les stigmates. En effet, elle risque de s’effondrer. D’après une étude menée depuis 2018, cinq éboulements ont été recensés dont deux ayant emmené jusqu’à 2 000 m³ de roches. Le directeur du Bureau de Recherches Géologiques et Minières de Corse, Baptiste Vignerot analyse, « Le site présente une réelle instabilité. Un scénario de rupture ne concernerait pas l’ensemble de la hauteur de la falaise. Il s’agirait plutôt de petits phénomènes qui peuvent impacter les fondations des maisons. Un jour, ça s’effondrera sans doute. Quand ? Nul ne le sait. » Une récente expertise a estimé que près de 33 immeubles sont grandement menacés. Un nouvel arrêté préfectoral à interdit l’habitation de certaines zones jugées trop dangereuses. Un riverain, délogé début octobre déclare, « Ici, c’est bien plus que ma maison, c’est mon héritage et mes souvenirs d’enfance. Je ne vois pas pourquoi on m’obligerait à partir. »
Trop usée ?
Les îles Lavezzi en carte postale, les confréries en héritage, les falaises de Bonifacio sont une espèce en voie de disparition. Tandis que l’érosion vient naturellement récupérer à la terre ce qu’elle lui a donné, en surface il faut préserver comme on peut. D’après les géologues du BRGM de Corse, l’installation de 200 boulons d’ancrage coûterait aux alentours d’un million d’euros. Malgré le coût budgétaire, Baptiste Vignerot envisage surtout la difficulté patrimoniale de ce potentiel chantier, « Un confortement est possible, même si la faisabilité technique est loin d’être évidente au regard du risque de déstabilisation, estime Baptiste Vignerot. Il faut également tenir compte du fait que la falaise est classée comme site patrimonial remarquable, ce qui n’enlève rien à la complexité de la tâche. » Tandis que de nombreuses inquiétudes locales visent aussi les édifices naturels, à l’image du long escalier creusé dans la roche au XVème siècle, le maire Jean-Charles Orsucci, appelle à la responsabilité de l’État, « À force de chercher des problèmes, on va en trouver. Je ne peux que comprendre la détresse des habitants et, en même temps, la nécessité de les protéger. Dans cette affaire, l’État ouvre le parapluie. Mais il faudra bien en sortir. » Après plus de 1 000 ans d’une histoire très mouvementée, la Cité des falaises va-t-elle finir sa vie dans les profondeurs ?