Depuis plusieurs jours, Lampedusa, la petite île italienne, est devenue la terre d’exil d’environ 8000 migrants venus d’Afrique du Nord. Une situation qui relance très largement les débats sur la solidarité européenne. Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, à peine revenu de sa visite à Rome, s’est exprimé sur la question. Et il s’est montré très clair : «la France n’accueillera pas de migrants qui viennent de Lampedusa»

Distinguer les réfugiés politiques des autres

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Les propos de Gérald Darmanin interrogent, puisque quelques jours avant, le président de la République, Emmanuel Macron. En effet, alors que Berlin suspendait l’accueil volontaire de demandeurs d’asile, il défendait un « devoir de solidarité européenne ». Pour le ministre de l’Intérieur, la solidarité n’est pas une priorité. «Il y a une immigration irrégulière en Europe, en France et en Italie qu’il faut combattre, et ce n’est pas en accueillant plus de personnes qu’on va tarir un flux qui évidemment touche nos capacités d’intégration», a-t-il expliqué, sur TF1. Pour autant, si le gouvernement français entend bien se montrer ferme, il n’exclut pas de venir en aide à l’Italie. «Nous avons dit à nos amis italiens que nous étions prêts à les aider pour reconduire des personnes dans les pays avec lesquels nous avons de bonnes relations diplomatiques». 

Gérald Darmanin a tout de même tenu à éclaircir un point. Celui des demandeurs d’asile. Parmi les 8500 migrants arrivés à Lampesdusa, « il y a des Ivoiriens, des Sénégalais…qui n’ont pas demandé l’asile en Europe». D’après le ministre, la question est donc de savoir « distinguer les migrants des personnes qui sont des réfugiés politiques ». La France a donc demandé à l’Italie d’effectuer des contrôles qui permettront de faire une distinction. « Si les personnes sont éligibles à l’asile, s’ils sont persécutés sexuellement, politiquement, religieusement, évidemment c’est le devoir de la France, comme d’autres pays européens, de les accueillir. Mais si les personnes ne sont pas éligibles à l’asile (…) il n’y a pas, sauf exception, d’asile politique à donner à ces personnes ».

« Hystérisation du débat »

Invité sur France info, le vice-président de l’ONG Médecins du monde, Jean-François Corty, a dénoncé une « hystérisation du débat sur l’immigration » provoquée par les propos du ministre de l’Intérieur. Refuser d’accueillir certains de ces migrants « ne répond pas aux besoins d’apporter des solutions à la crise humanitaire créée par l’Europe à Lampedusa », affirme Jean-François Corty. Et « par cette posture politique », Gérald Darmanin « ne répond pas à plusieurs éléments, dont le fait de renforcer une solidarité nécessaire entre Européens, pour désengorger les dispositifs saturés comme en Grèce ou en Italie. »

Du côté de Damien Carême, député européen Groupe des Verts/Alliance libre européenne, les propos de Gérald Darmanin ne passent pas. « Le ministre de l’Intérieur ne répond pas aux conventions internationales quand il déclare qu’il y a des nationalités qui ne sont pas admissibles au devoir d’asile, a-t-il déploré au micro de Franceinfo. Il ne peut pas décréter, parce que ce sont des Ivoiriens, des Sénégalais, qu’on n’examine pas leur demande d’asile parce qu’on a de bonnes relations avec ces pays-là. On ne sait pas ce que ces personnes subissent ».

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