Depuis le 7 octobre, les conditions sanitaires ne font qu’empirer dans la bande de Gaza, laissant la catastrophe humanitaire gagner du terrain. Médecins du monde tire la sonnette d’alarme et appelle à un cessez-le-feu. 

La situation « est catastrophique » selon Médecins du monde. Le 18 décembre, plusieurs organisations humanitaires (Oxfam, Médecins sans frontières, Médecins du monde, Première Urgence internationale, CCFD-Terre solidaire, Handicap international…) ont rassemblé leur voix pour appeler à un cessez-le-feu immédiat et durable dans la bande Gaza pour répondre aux besoins vitaux de deux millions de personnes.

Une aide médicale difficile

« On est face à un effondrement du système de santé, avec des institutions qui ne fonctionnent plus et des civils qui sont dans une situation de stress totale », explique Jean-François Corty, vice-président de Médecins du monde, dans Apolline Matin sur RMC. Depuis que la guerre a repris le 2 décembre, après une brève trêve humanitaire, il est impossible pour les soignants de se rendre sans danger dans la bande Gaza pour accorder les soins nécessaires aux Gazaouis.  À la mi-décembre, le ministère de la Santé à Gaza, sous la gestion du Hamas, rapportait un nombre alarmant de 50 000 blessés. Cette crise sanitaire était exacerbée par une pénurie de médicaments et un manque de lits d’hôpital. 

Dans un contexte marqué par les bombardements, offrir des soins adéquats devient une tâche herculéenne. Lors d’une conférence de presse tenue le 18 décembre par plusieurs ONG, Joël Weiler, directeur général de Médecins Du Monde, exprimait sa profonde préoccupation. « J’ai peur que l’on s’habitue et que l’on trouve normal de bombarder les hôpitaux », soulignant que « 25 des 36 hôpitaux sont détruits ». Sur RMC, Jean-François Coty déplore la difficulté à exercer son travail. « Nos équipes sont soumises au même régime que les Gazaouis. Elles ne peuvent pratiquement plus travailler. (…) Nous avons du mal à faire entrer le matériel, à assurer la sécurité de nos équipes. Les humanitaires ne sont pas des martyrs. Nous avons déjà eu un mort et c’est plus d’une centaine de morts chez les Nations unies, quatre morts chez Médecins sans frontières. On ne peut pas travailler dans ces conditions », assène-t-il.

La mort comme perspective

Depuis le début de la guerre, on dénombre environ 20 000 morts « avec une majorité de femmes et d’enfants » précise le médecin. En plus de risquer d’être bombardés n’importe où, les Gazaouis doivent faire face à des épidémies résultant de leurs conditions de vie. « Hépatite A, infections digestives, parce qu’ils ont des difficultés à avoir accès à l’eau et à la nourriture, précise Jean-François Coty. Ma collaboratrice, qui vient d’avoir un bébé il y a trois semaines, qui est sur place, son bébé tousse à cause des bombardements à proximité et de la fumée. Elle a du mal à le nourrir tous les jours. Elle lui fait boire de l’eau saumâtre. Et l’eau saumâtre, pour les enfants en bas âge, quand vous ne pouvez pas être soigné, c’est la mort certaine dans les jours qui suivent. Nos équipes, quand on les a au téléphone, on se dit chaque jour au revoir et peut-être qu’on ne va pas les avoir au bout du fil le lendemain parce que la perspective de la journée, c’est la mort, dans un contexte où on a faim, où on ne peut pas être soigné ». Samah al-Farra, une palestinienne de 46 ans, décrit son quotidien au New York Times :  « Quand je me lave les mains, j’ai l’impression qu’elles deviennent plus sales ». 

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a récemment rapporté une situation alarmante à Gaza, avec au moins 170 000 infections respiratoires et plus de 125 000 cas de diarrhée enregistrés dans l’enclave. En comparaison entre 2021 et 2022, les cas de diarrhée ont été 45 fois moins fréquents selon les données de l’OMS. Les enfants de moins de 5 ans sont particulièrement affectés par ces conditions. De plus, l’agence exprime son inquiétude face à l’augmentation des cas de varicelle, de jaunisse et de méningite, des maladies qui se répandent de plus en plus à Gaza. Des chercheurs de l’École d’Hygiène et de Médecine Tropicale de Londres alertent sur le fait que, si le conflit à Gaza se poursuit, on assistera à une augmentation de la propagation et de la gravité des maladies dans les trois mois à venir. Selon ces experts, l’absence de vaccination et la malnutrition, qui s’aggravent à mesure que le conflit perdure, contribuent significativement à l’accélération des épidémies.

Les hôpitaux font office de morgue

©unsplash

L’enclave, qui comptait jusqu’alors 36 établissements de santé, n’en compte plus que neuf, encore fonctionnels. « Quand j’ai visité Al Ahli la semaine dernière, il y avait encore deux chirurgiens, dont un chirurgien orthopédique. Ils m’ont expliqué qu’ils devaient faire des amputations, mais qu’ils n’auraient jamais eu besoin de les faire s’il y avait encore un chirurgien vasculaire à l’hôpital. Partout où l’on regarde à Gaza, on voit des personnes amputées. Des hommes, des femmes, des enfants… Beaucoup d’enfants », rapporte le Dr Richard Peeperkorn, représentant de l’OMS, à France info. « Des enfants amputés qui n’auraient pas dû l’être… Je crois que ça veut tout dire ». Dans le sud, « il reste deux, trois hôpitaux qui sont saturés de blessés et de malades classiques parce qu’on ne peut plus assurer les soins, comme l’asthme, le diabète, et on reçoit aussi beaucoup de morts. Donc ces hôpitaux, ce sont des morgues », souligne Jean-François Coty. 

Mentions de Cookies WordPress par Real Cookie Banner
Exit mobile version