En 46 secondes, Imane Khelif a remporté son huitième de finale face à Angela Carini. Un direct au visage a suffi à faire abandonner son adversaire italienne. Celle-ci a ensuite confirmé que les coups d’Imane Khelif étaient trop puissants. En levant la main comme signe d’abandon, l’Italienne scandait « ce n’est pas juste », avant de refuser de lui serrer la main. De quoi nourrir les rumeurs quant au sexe de la boxeuse, accusée d’être un homme.

Harcèlement sur les réseaux

Il n’aura pas fallu beaucoup de temps pour que la boxeuse algérienne devienne la cible de rumeurs de la part de personnalités publiques ultra conservatrices. Donald Trump, la Première ministre italienne Giorgia Meloni ou encore Elon Musk ont ainsi accusé à tort la boxeuse de ne pas être une femme ou d’être transgenre. L’année dernière, Imane Khelif avait été écartée des mondiaux en 2023 par la fédération internationale de boxe (IBA) en raison de son supposé taux de testostérone trop élevé. Mais selon Anaïs Bohuon, professeure à l’Université Paris-Saclay, « rien ne nous permet d’affirmer qu’elle produise des quantités élevées de testostérone ou bien qu’elle soit intersexe, puisque nous n’avons pas accès à son dossier médical ». L’ancien directeur de la commission médicale de l’IBA, Ioannis Filippatos, a de son côté affirmé que des tests sanguins réalisés en 2022 avaient révélé des « anomalies ».

« Cela peut détruire les gens, cela peut totalement absorber leurs pensées, leur esprit et leur âme. Cela peut diviser les gens. Et pour cette raison, je demande à tout le monde de s’abstenir de toute forme d’intimidation », a de son côté abondé Imane Khelif. « Je suis en contact avec ma famille deux jours par semaine. J’espère qu’ils n’ont pas été profondément affectés, a-t-elle déclaré. Ils s’inquiètent pour moi. Si Dieu le veut, cette crise se terminera par une médaille d’or et ce serait la meilleure réponse », a-t-elle ajouté.

Imane Khelif respecte « les règles d’éligibilité »

« Je ne suis personne pour juger ou prendre une décision, si cette femme est ici, il y a une raison », avait déclaré Angela Carini après le combat. En effet, si la boxeuse algérienne a pu boxer, c’est parce qu’elle répond à certains critères qui permettent, ou non, de prendre part aux Jeux olympiques en qualité d’athlète. « Tous les athlètes participant au tournoi de boxe des Jeux olympiques Paris 2024 respectent les règles d’éligibilité et d’inscription à la compétition, ainsi que toutes les règles médicales applicables établies par l’Unité de Boxe Paris 2024. Comme pour les compétitions de boxe olympiques précédentes, le sexe et l’âge des athlètes sont basés sur leur passeport », a ainsi expliqué Thomas Bach, président du Comité international olympique (CIO). De son côté, le porte-parole du CIO, Mark Adams, s’époumone à rappeler que Imane Khelif est « née femme, enregistrée comme femme, vit sa vie en tant que femme, boxe en tant que femme ».

Redéfinition de la femme

Dans cette polémique, le taux de testostérone est le principal argument pour alimenter les rumeurs sur une transidentité. Pourtant, la testostérone est une hormone présente chez l’homme comme chez la femme, à des niveaux différents pour chacun. Mais ce n’est pas cette hormone qui permet de définir le sexe d’une personne. Certaines femmes ont un taux de testostérone très élevé en raison du syndrome des ovaires polykystiques (SPOK). C’est en fait la première cause de ce qu’on appelle l’hyperandrogénie. « Il ne suffit pas de produire beaucoup de testostérone pour devenir champion olympique, comme il ne suffit pas de faire 2,20 m pour être champion de basket ! Aucun scientifique ne parvient à dire que ces femmes ont un avantage physique significatif », a martelé Anaïs Bohuon dans les colonnes de Ouest France.

Le principal problème ? l’IBA semble vouloir donner une certaine définition à ce qu’est une femme.

« Ce que nous constatons maintenant, c’est que certains veulent s’approprier la définition de qui est une femme », a déclaré Thomas Bach ce samedi. « Et là, je ne peux que les inviter à proposer une base scientifique, une nouvelle définition de qui est une femme, et comment une personne née, élevée, concourant et possédant un passeport en tant que femme ne peut-elle pas être considérée comme telle », a-t-il taclé. « S’ils proposent quelque chose, nous sommes prêts à les écouter, nous sommes prêts à examiner la question, mais nous ne participerons pas à une guerre culturelle politiquement motivée », a-t-il sobrement conclu.

Pour l’heure, Imane Khelif est en route pour l’or. Elle combattra face à la Chinoise Yan Liu le vendredi 9 août à 22h50.

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