La consommation d’alcool augmente le risque de cancer du pancréas, même à faibles doses, selon une vaste étude du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), rattaché à l’OMS.
Alors que le cancer du pancréas reste l’un des plus redoutables en termes de mortalité, une nouvelle étude internationale met en lumière un facteur de risque souvent sous-estimé : l’alcool. Publiée ce mois-ci par le CIRC, l’agence de l’Organisation mondiale de la santé dédiée à la recherche sur le cancer, l’étude démontre que la consommation régulière d’alcool, même modérée, augmente significativement le risque de développer ce type de tumeur. Un message fort, alors que les campagnes de prévention ciblent encore trop peu le lien entre alcool et cancer.
Un risque accru dès un à deux verres par jour
Le cancer du pancréas est connu pour son pronostic sombre : en France, il est responsable de près de 13 000 décès par an et affiche un taux de survie à 5 ans inférieur à 10 %. C’est aussi l’un des cancers dont l’incidence progresse le plus, avec environ 16 000 nouveaux cas recensés en 2023. Selon l’étude du CIRC, chaque verre d’alcool consommé quotidiennement (environ 10 g d’alcool pur) augmente de 3 % le risque de développer un cancer du pancréas. Le risque grimpe plus nettement à partir de deux verres par jour chez les hommes (+15 %) et un à deux verres chez les femmes (+12 %). Contrairement à d’autres facteurs de risque souvent associés (comme le tabac ou le surpoids), cette association reste significative même chez les non-fumeurs, ce qui en fait un facteur indépendant.
Le Dr Kevin Ferrari, co-auteur de l’étude, souligne : « Il ne s’agit pas de consommation excessive ou de dépendance, mais bien d’un effet dose-réponse mesurable dès des niveaux considérés comme modérés. » Le lien entre alcool et cancer est déjà bien documenté pour d’autres localisations (foie, sein, colon, bouche), mais le pancréas s’ajoute désormais avec certitude à cette liste.
Une prévention encore trop timide en France
Face à ces données, plusieurs experts appellent à renforcer les mesures de sensibilisation sur les risques liés à l’alcool, y compris à faible dose. L’Organisation mondiale de la santé recommande depuis plusieurs années l’introduction d’étiquetages sanitaires sur les bouteilles d’alcool. En 2026, l’Irlande deviendra le premier pays européen à rendre ces mentions obligatoires, avec des avertissements similaires à ceux des paquets de cigarettes. En France, aucune mention spécifique au cancer n’est encore imposée sur les étiquettes. La loi Evin encadre la publicité, mais le message de modération reste flou pour une majorité de consommateurs. L’Institut national du cancer (INCa) souligne que 1 cancer sur 20 en France est lié à l’alcool, soit environ 28 000 nouveaux cas chaque année.
Pour le Dr Ferrari, l’étude du CIRC devrait faire évoluer les discours publics : « La consommation d’alcool est encore trop souvent banalisée, voire valorisée culturellement. Or le risque existe, même sans excès. Il est temps de revoir notre façon de parler de l’alcool, comme on l’a fait pour le tabac. »