Deux jours après avoir présenté sa démission, Sébastien Lecornu a dressé, mercredi 8 octobre, le bilan de ses 48 heures de consultations politiques. 

Invité sur le plateau de France 2, le Premier ministre démissionnaire a confirmé qu’un projet de budget serait déposé lundi, tout en reconnaissant qu’il ne serait « pas parfait ». Il estime désormais que sa « mission est terminée », et qu’un nouveau chef du gouvernement pourrait être nommé dans les 48 heures.

« Ma mission est terminée »

Lundi, Sébastien Lecornu avait remis sa démission à Emmanuel Macron, qui l’avait acceptée tout en lui confiant une dernière tâche : mener d’ultimes discussions avec les forces politiques pour tenter de sortir le pays de l’impasse. Durant deux jours, il a reçu les représentants de la majorité et de l’opposition pour sonder les conditions d’un compromis budgétaire. « J’avais ce réseau pour mener ces ultimes discussions en 48 heures », a-t-il expliqué mercredi soir. « J’ai tout essayé, dans des conditions pas faciles. »

Il estime que « la perspective d’une dissolution s’éloigne » et qu’un « chemin est possible », même s’il reste « difficile ». D’après lui, une majorité de députés « refuse la dissolution » et souhaite éviter un retour aux urnes : « Il y a une majorité absolue à l’Assemblée nationale qui refuse la dissolution, qui amènerait au même résultat. »

Un budget « pas parfait », mais nécessaire

Le Premier ministre démissionnaire a annoncé que le projet de loi de finances sera déposé dès lundi prochain, malgré l’instabilité politique actuelle. « Le budget est l’objet de mes consultations pendant 48 heures », a-t-il précisé. « Les partis m’ont dit qu’on ne peut pas prendre le risque de ne pas avoir de budget au 31 décembre. » Il reconnaît que le texte « ne sera pas parfait », mais appelle à ouvrir le débat rapidement : « Il faut que les débats démarrent. En cas de hausse d’impôt, il faudra le justifier. » Pour Sébastien Lecornu, la priorité est d’éviter un vide budgétaire, qui plongerait le pays dans une crise institutionnelle : « Il y a urgence. On ne peut pas bloquer le pays. »

Revenant sur la réforme des retraites, l’un des sujets les plus explosifs du quinquennat, le Premier ministre démissionnaire admet qu’il s’agit d’un « dossier bloquant », toujours source de fractures politiques : « Il faudra trouver un chemin pour que le débat ait lieu sur la réforme des retraites. » S’il défend toujours la logique du système par répartition, il partage désormais le “sentiment des Français que le débat ne s’est pas déroulé normalement”. La suspension de la réforme, a-t-il ajouté, coûterait au moins 3 milliards d’euros d’ici 2027. Selon lui, ce sujet reviendra « inévitablement » dans la campagne présidentielle à venir : « Ce sera un débat de fond pour 2027. »

« Ce n’est pas le moment de changer de président »

Sébastien Lecornu, qui quitte Matignon après seulement quelques mois, a également évoqué la composition du futur gouvernement, qu’il souhaite plus neutre et concentré sur les priorités du pays. « Il faut une équipe complètement déconnectée des ambitions pour 2027 », a-t-il affirmé. « La situation est déjà suffisamment difficile. Il faut qu’on ait une équipe qui se retrousse les manches et règle les problèmes du pays jusqu’à l’élection présidentielle. » Il reconnaît par ailleurs « un manque d’originalité » dans la composition de son propre gouvernement : « Sur ce point, je plaide coupable. » Une manière de reconnaître que son exécutif n’a pas su incarner le renouveau promis par Emmanuel Macron après la série de remaniements intervenus depuis un an.

Alors qu’Édouard Philippe a suggéré la veille d’organiser une présidentielle anticipée après le vote du budget, Sébastien Lecornu prend ses distances avec cette idée. « Ce n’est pas le moment de changer de président », a-t-il tranché.Pour lui, dans un contexte international marqué par les tensions au Proche-Orient et en Ukraine, la stabilité doit primer :« Emmanuel Macron doit gérer une tension internationale inédite. C’est à lui de s’adresser aux Français en temps utile. » Le Premier ministre démissionnaire met en garde contre une culture de l’instabilité : « Quand on donne un mandat, si on commence dès qu’il y a un peu de tempête à dire “il faut s’en aller”, alors ça pèsera sur les futurs présidents, puis sur les maires et les députés. »

Les Républicains « ne sont pas macronistes »

Interrogé sur les tensions avec Bruno Retailleau, qui a pris ses distances avec le gouvernement démissionnaire, Sébastien Lecornu a rappelé la nature particulière de leur coopération : « Les Républicains ne sont pas macronistes, mais ils sont venus épauler le socle commun », a-t-il souligné. Cette précision illustre le fragile équilibre entre la majorité présidentielle et la droite, dans un contexte où plusieurs élus LR ont participé ponctuellement au soutien parlementaire du gouvernement sans jamais rejoindre pleinement la coalition.

Après avoir « expédié la vie courante », selon ses propres mots, Sébastien Lecornu laisse la place à Emmanuel Macron, qui doit désormais choisir son successeur dans les 48 heures. Le futur Premier ministre devra composer un gouvernement capable de faire adopter le budget, tout en évitant une nouvelle crise politique. « Il y a un chemin possible », a répété Lecornu. « Ce chemin sera difficile, mais il existe. »

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